La césarienne-party, la nouvelle mode au Brésil !

Par CK

Vous pensiez que l'accouchement était un événement éminemment privé ?

Détrompez-vous ! Dans plusieurs régions du monde, la naissance est un événement hautement social, et qui se partage en temps réel !

Au Brésil, par exemple, plus de la moitié des accouchements pratiqués se font par césarienne !

Pourquoi ?

Tout d'abord parce que dans la culture locale, y compris médicale, la césarienne est perçue comme le moyen le plus sûr de mettre un enfant au monde. 

D'autre part, parce que la césarienne permet aux parents de planifier très précisément la naissance du bébé, et donc les festivités qui vont avec, souvent au sein même de la maternité, en temps réel, avec parfois plus d'une centaine d'invités !

La césarienne : un mode d'accouchement préférentiel

Pour les médecins, la pratique de la « cesariana » présente plusieurs avantages : c'est une technique maîtrisée qui réduit le taux de mortalité infantile, elle leur évite d'être sollicités à l'improviste et d'être longtemps mobilisés ; enfin, elle leur permet de facturer plus cher leur prestations que lors des accouchements par voie basse.

Ainsi, dès le début de la grossesse, le médecin informe la maman que le mode d'accouchement sera d'emblée la césarienne ! Loin de l'inquiéter, ce choix au contraire la rassure pleinement.

« Il faut garder en tête qu'au début, la césarienne était le mode d'accouchement des élites privilégiées du Brésil » témoigne Paloma sur un réseau social d'expatriés.

Andrea, son compagnon, surenchérit : « Statistiquement, le taux de mortalité infantile et maternel est inférieur lorsqu'une césarienne est pratiquée dans de bonnes conditions »

« C'est purement culturel ! », témoigne à son tour Priscilla, maman brésilienne installée en France depuis quelques années.

Elle ajoute : « Toutes mes cousines ont eu recours à une césarienne, et elle a été planifiée dès le début de la grossesse. Au Brésil, les femmes ont peur de l'accouchement naturel et les obstétriciens brésiliens en rajoutent en leur expliquant que la césarienne est le mode d'accouchement de premier choix, qu'il est sans douleur et qu'il permet une récupération rapide et maîtrisée ! »

Il faut dire qu'au Brésil, les actes chirurgicaux sont depuis longtemps banalisés.  

Dans ce pays adepte de la plastique parfaite, des nez refaits, des implants fessiers, des liposuccions — et autres actes chirurgicaux que les Français perçoivent comme invasifs —  la chirurgie est monnaie courante.

« La césarienne c'est rassurant » ajoute Priscilla, « On n'est pas prise au dépourvu, on évite tout le tralala avec les contractions, la poche d'eau qui se rompt, la course vers la maternité... Et puis la cicatrice est bien propre, elle ne dérange pas, ce n'est pas comme une épisiotomie pratiquée à la hâte ! »

Martina, son amie brésilienne qui a déjà mis au monde trois enfants par césarienne au Brésil surenchérit en décrivant sa perception des suites d'un accouchement par voie basse : « L'accouchement par le vagin élargit le corps, alors c'est moins bien sexuellement après, et puis ça peut perturber le papa, puisque c'est au même endroit intime que ça se passe... »  

Désormais au fait des coutumes françaises puisqu'elle s'est installée depuis quelques années à Paris, Priscilla explique encore : « On n'a pas autant de sages-femmes au Brésil qu'en France ! Et elles ne font pas le même métier ! En France, la sage-femme est formée pour suivre la grossesse avant, pendant et après l'accouchement. Au Brésil, après l'accouchement, à part le médecin, et parfois la kiné, il n'y a personne ! »

L'accouchement par voie basse est ainsi, au Brésil, relativement peu encadré dans la durée. L'accompagnement post-partum y est également moindre puisque le suivi gynécologique se pratique principalement par le médecin.

Soit ! Mais c'est une chose de préférer l'accouchement par césarienne à l'accouchement vaginal, et c'en est une autre de transformer ce moment médicalisé et intime en « festa de cesariana » (césarienne-party »), réunissant parfois à l'hôpital, une centaine d'invités autour de la maman, au moment même de l'incision abdominale !

Sens pratique et culture de la fête peuvent rimer avec césarienne !

Il est vrai qu'entre opter pour une césarienne et planifier une césarienne-party, il y a un monde !

Quelles sont donc les raisons qui motivent cette nouvelle tradition brésilienne, dont la réputation dépasse les frontières du pays et s'étend à de nombreux pays d'Amérique Latine ?

Selon Ana, maman brésilienne trentenaire également installée à Paris, les Brésiliens adorent la fête. Mais ce n'est pas pour cette raison seulement qu'ils organisent les « festa de cesariana ». Selon elle, fêter l'événement à la maternité dispense les mamans de devoir endurer une longue suite de visites de courtoisie à leur domicile après la naissance !

Elle ajoute : « Je vois beaucoup de mamans en France qui souffrent de baby-blues, et qui se sentent seules et isolées. Au Brésil, on profite de la présence de ceux qu'on aime et qui comptent dans nos vies, dès le moment de la naissance, c'est de la joie partagée ! »  

Organiser une réception à l'hôpital permet donc de concentrer toutes les visites à un moment bien déterminé, libérant ainsi les jeunes parents de tout devoir social une fois de retour à la maison.

«  Après la naissance, on est fatigué, on n'a pas envie d'avoir une longue série de visites à la maison pour présenter le bébé ! » plaide encore Ana.

Pour Florentina, sa cousine enceinte de 4 mois et qui réside à Brasilia, l'affaire est déjà classée puisqu'elle a d'ores et déjà opté avec son médecin pour une césarienne et prévenu la maternité qu'elle comptait y organiser une fête simultanément:  « Pourquoi s'embarrasser d'une longue série d'invitations où les amis et la famille passent à tour de rôle à des moments inopportuns pour découvrir le bébé et féliciter la maman ? »

Elle ajoute : « C'est lorsque nous rentrons chez nous avec le bébé que nous avons le plus besoin de calme ». 

Et c'est parce que la césarienne — contrairement à l'accouchement naturel — se décide à l'avance et se déroule dans un laps de temps très court, qu'elle  permet de planifier des événements festifs et sophistiqués... dès l'hôpital !

D'où le raz-de-marée de « festa de cesariana » ou « c-section parties » organisés dans les maternités qui, elles-mêmes, jouent pleinement le jeu et en tirent une importante  source de profits !

Les festivités au sein de l'hôpital se facturent cher et s'organisent avec des party-planneurs !

Vous souhaitez organiser une césarienne-party prestigieuse ?

Arrangements floraux, livres d'or, bouteilles d'eau personnalisées, serviettes en papiers monogrammées, cocktails servis sur des plateaux d'argent... Tout est possible : les « C-section party » s'organisent au Brésil comme des mariages avec des party-planners spécialisés et l'assentiment des maternités et hôpitaux qui y voient un business florissant.

Il faut bien sûr avoir envie d'y mettre le budget...

Selon l'entreprise de party-planning Estudio Matre, interviewée par le Daily Mail, le budget moyen des clients qui font appel à leurs services est de 10 000 dollars. Il inclut fleuristes, livre d'or, faire-part sur-mesure, friandises servies sur des plateaux d'argents, etc.

« Aujourd'hui, un accouchement réussi doit mobiliser coiffeur, maquilleur, esthéticienne, mais aussi traiteur, fleuriste et parfois DJ ! » dit Barbara, party-planneuse trentenaire spécialisée dans les « c-section » événementielles.

Elle ajoute : « Les Brésiliennes aiment être impeccables en toutes circonstances.  Elles veulent avoir les ongles faits, le corps épilé, les cheveux impeccables, et elles aiment que tout se déroule comme elles l'ont prévu ».

Pour Mariana, la venue au monde d'un enfant est un événement spécial. Son argument est désarmant : « On s'habille bien lorsque l'on veut fêter quelque chose ! On met de la musique, on boit, on célèbre le moment, c'est pareil pour une naissance ! »

Et elle ajoute : «  Mon corps va subir d'importants changements hormonaux, ma vie de femme et de couple va être chamboulée. Avoir envie d'être entourée dès l'hôpital de gens que l'on aime est naturel. »

Alors comment se passe concrètement la « c-section party » ?

Imaginons que vous y êtes invité(e) !

Vous recevrez quelques semaines à l'avance un joli faire-part cartonné vous conviant à une fête organisée en l'honneur de la venue au monde de l'enfant à naître, avec la date et l'heure prévue de la fête ainsi que l'adresse de l'hôpital et la salle de réception avec le fameux RSVP au bas du carton !

Le jour J, si vous faites partie des intimes, vous pourrez être admis dans la pièce jouxtant la salle de naissance, et suivre le déroulement de la naissance à travers une paroi vitrée, en direct !

Le ventre ouvert de la maman vous sera bien-sûr masqué, mais aussitôt le bébé sorti, il sera brandi de manière bien visible, et vous pourrez le contempler au même moment que la maman et le papa, et suivre chaque étape de l'événement à travers la paroi vitrée : la fameuse petite claque sur les fesses de bébé, la section du cordon, la pesée, etc.

Ce sera le moment de porter un toast à la maman et au bébé, des coupes de champagne vous seront présentées sur des plateaux d'argent par des stewards aux mains gantées, et vous pourrez grignoter d'exquises friandises.

Vous pourrez ensuite enchaîner la célébration avec les autres invités dans la chambre de la maman. Vous pourrez vous exclamer devant la porte décorée du nom de bébé avant de pénétrer dans sa chambre ou plutôt dans sa suite si elle a décidé d'y mettre les moyens !

En effet, pourquoi se suffire d'une banale chambre d'hôpital, alors que l'on peut réserver tout une suite pour accueillir ses invités ?

A titre d'exemple, la suite présidentielle de l'hôpital Sao Luiz de Sao Paulo se loue à 500 dollars par jour, elle dispose d'un salon, de toilettes privées pour les invités, d'un balcon privatif, d'un bon système sono et, bien sûr, d'un bar !

Et la tendance se poursuit vers plus de sophistication : de nouvelles maternités prévoient des salles de bal, des caves à vin, des jeux de lumières... Bref, elles sont disposée à apporter leur concours pour contribuer à transformer la naissance de bébé en événement spectaculaire et mémorable pour les parents et, au passage, très lucratif pour elles!

La césarienne : un mode d'accouchement qui se propage

Globalement, dans le monde, 21% des naissances se pratiquent par césarienne.

Au Brésil, ce chiffre s'élève à 55,5% et atteint des pics de 84% dans certaines maternités selon le Ministère de la Santé brésilien.

Plus fort que le Brésil en matière de record de césariennes pratiquées ?  La République Dominicaine !

Voici les chiffres avancés par l'étude Lancet « Global epidemiology of use of and disparities in caesarean sections » parue en Octobre 2018

  • République Dominicaine 58,1%,
  • Brésil 55,5%
  • Egypte 55,5%
  • Turquie 53,1%
  • Venezuela 52,4%
  • Etats-Unis 32,9 %

La césarienne devient aussi aujourd'hui le mode d'accouchement préféré des Chinoises aisées.

Et pourtant la césarienne présente des risques...

La démocratisation et la nouvelle popularité de la césarienne ne réduisent pas pour autant les risques qui lui sont liés. Il est médicalement établi que la pratique de la césarienne augmente le risque d'hémorragies et d'infections.

De plus, pratiquée avec le terme naturel du bébé, on constate souvent chez les bébés nés par césarienne des troubles respiratoires, du diabète, et une forte pression artérielle.

Un contre-courant s'organise donc, au Brésil, qui vise à réhabiliter l'accouchement par voie basse.

Le directeur de la Maternité Albert Einstein, Linus Pauling Fascina, déploie ainsi de nombreux efforts pour changer les mentalités et redonner des lettres de noblesse à l'accouchement naturel.

Sa stratégie ? Offrir aux femmes accouchant par voie naturelle la possibilité de vivre une expérience aussi prestigieuse que lors d'une césarienne !

Il a ainsi équipé des « unités de naissance par voie naturelle » de nec plus ultra technologique : salles avec jeux de lumières au plafond contrôlés par la maman, enceintes et MP3 avec playlists personnalisables, douches et baignoires privatives...

Il veille également à l'évolution des mentalités des médecins et infirmières en les formant à un accompagnement approprié.

Ses efforts rencontrent un franc succès puisqu'en l'espace de quelques années, le taux d'accouchement par voie vaginale de son hôpital est passé de 18% à 50% !

Pour autant, il ne vient pas à bout de toutes les réticences.

Cristina future maman dont le terme est en août témoigne : « Avec un accouchement naturel, on doit avoir les jambes écartées, posées sur des trépieds, avec tout qui sort du corps, c'est dégoûtant, je ne vois pas pourquoi s'accrocher à ces traditions ancestrales quand on peut faire les choses jolies, propres, et partageables avec ceux qu'on aime ! »

Et  son compagnon surenchérit : « Et puis on ne peut pas le planifier vraiment, c'est ennuyeux pour les vacances ! »

En effet, l'accouchement par voie basse reste rarement déclenché, et ne se planifie pas comme une césarienne. Aussi, les taux de naissance par césarienne continuent d'exploser à l'approche des vacances.

C'est ainsi que Bruna, jeune maman de 32 ans, confiait récemment au Washington Post : « un accouchement naturel ne correspond pas à notre style de vie. Nos vies sont très planifiées, et nous avons posé nos vacances pour la naissance du bébé. »

Femme au foyer ? Pas du tout : Bruna est médecin, tout comme son mari. A deux, ils ont tenu à décorer la chambre d'hôpital avec des ballons bleus en l'honneur de leur fils à naître et d'équiper la chambre d'un réfrigérateur capable de contenir suffisamment de boissons fraîches pour désaltérer leurs 80 invités !

Pragmatisme ou Culture ?

Ana,  brésilienne ayant mis au monde son premier enfant à la Maternité Catholique Sainte Felicité du 15e arrondissement, raconte que le personnel de la maternité était au fait de la pratique automatique des césariennes au Brésil.

L'anesthésiste et l'obstétricien l'ont directement prévenue qu'en France, la césarienne n'était pratiquée que lorsqu'elle était médicalement nécessaire.

Finalement, à l'approche du terme, la césarienne s'est avérée nécessaire pour des raisons médicales.

Ana a fondu en larmes, provoquant l'amusement des médecins : « Savez-vous vous que vous êtes la première brésilienne qui pleure en apprenant qu'elle devra subir une césarienne ? »

... Et vous ? Avez-vous eu un enfant par césarienne ? 

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Crédit photo : un immense merci à Alex Hockett @ Unsplash   

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