Le burn-out parental : une réalité d'aujourd'hui

Par Yaël Landau

Pression de la société, épuisement psychologique, peur de ne pas être à la hauteur...

... Le burn-out parental est une réalité qui touche de nombreux parents!

Après le bien connu baby blues, voici le burn-out parental…

Après l'accouchement, certaines jeunes mères deviennent hypersensibles ou d'humeur variable, sans parvenir à contrôler leurs émotions. Elles pleurent sans raison, deviennent irritables et expriment un sentiment d'épuisement et/ou de confusion, avec certaines fois des difficultés à dormir...

Cette réaction post-natale est relativement fréquente : ce court épisode de déprime toucherait près de 60% des femmes qui accouchent.

Après, en général, tout va mieux. Du moins les jeunes mamans n'ont plus le temps de se laisser aller à ce type de mal-être. Elles s'affairent, s'occupent de leur bébé qui grandit, recommencent pour beaucoup à travailler.

Les papas suivent le mouvement, s'occupent de leur(s) enfant(s), des courses, de la maison.

Pour certains parents, s'installe alors une obsession : bien faire, devenir des parents parfaits, offrir par exemple à leurs enfants un cadre idéal, des repas sains et équilibrés, une éducation juste et ouverte sur le monde et surtout les moyens de faire face aux challenges qui les attendent dans leur vie d'enfants et plus tard, d'ados et enfin dans leur vie d'adulte.

Comme l'indique l'écrit Charlotte Ducharme, connue pour son blog Cool Parents Make Happy Kids, « pour coller à un idéal de perfection, bien des parents se mettent une pression d'enfer. On voudrait être au top au travail, avoir un couple merveilleux, et bien entendu devenir le meilleur des pères ou mères. Résultat, à trop courir après l'impossible (car, oui, je vous l'assure, c'est impossible !), on se retrouve vidé, épuisé, à bout — physiquement comme moralement. C'est le burn-out. »

Des parents en détresse

Voilà c'est dit : le burn-out parental est le terme employé aujourd'hui pour décrire la détresse des parents surmenés qui essaient de faire au mieux pour l'éducation de leurs enfants, et culpabilisent de ne pas toujours y arriver.

C'est également un terme qui décrit un épuisement intense de certains parents débordés par leur situation personnelle, entre enfant(s), travail, vie de couple et tenue de la maison.

Selon la psychologue Violaine Guéritault, le burn-out maternel se déroule généralement en 3 phases, :

  • L'épuisement physique et émotionnel
  • La distanciation, la dépersonnalisation 
  • Le reniement des accomplissements présents, passés et futurs

Une cascade d'états qui se succèdent avant l'effondrement brutal, et que nous décrivons plus en détail dans notre article « Les 3 phases du burn-out maternel ».

De nombreuses mamans ayant expérimenté un burn-out maternel en ont fait une force, qu'elles ont mise au service d'autres parents.

C'est le cas de Carmen Kervella, fondatrice de l'application gratuite d'entraide entre parents PopMoms

C'est aussi le cas de Shiva Shaffii, auteur de « Parent épuisé », dont le contenu tourne en dérision les situations familiales compliquées lorsque l'on a des enfants.

Ou encore d'Hélène Bonhomme, créatrice des Fabuleuses au foyer, qui accompagne par des newsletters quotidiennes les mamans au foyer, en puisant dans sa propre histoire de mère de jumeaux ayant vécu un burn-out . Elle explique sur son site :

  • « Mes jumeaux sont nés en novembre 2012 : gros tsunami de couches, de biberons, de nuits trop courtes et de questions existentielles. À force de me cacher derrière ma façade de mère parfaite, je suis tombée dans l'épuisement maternel. J'ai pu me reconstruire en apprenant à m'aimer dans mon imperfection. Je me suis entourée d'une équipe de fabuleuses chroniqueuses et ensemble, nous aidons les mamans qui veulent sortir la tête de l'eau ».

De plus en plus de formations sont proposées par des mamans qui sont elles-mêmes passées par le trauma du burn-out.

Charlotte Ducharme, créatrice de « Cool Parents Make Happy Kids », prône ainsi le lâcher prise et propose des formations pour aider les parents à faire face aux colères ou aux pleurs de leurs enfants, tout en restant bienveillants.

Intervenir le plus tôt possible

Tous les spécialistes s'accordent à dire qu'il est important de déceler en amont les symptômes qui conduisent au burn-out et d'apprendre très tôt à gérer émotionnellement sa fatigue.

La psychologue Liliane Holstein, confrontée à de nombreux parents démunis, explicite dans son ouvrage « Le burn out parental » un temps pour se poser, pour mesurer ses difficultés, et pour établir ses priorités.

Plus récemment, Valérie Duband, coach professionnelle, spécialisée dans les troubles des apprentissages des enfants et des ados, a publié « Parents épuisés - Stop à la surenchère émotionnelle et éducative pour éviter le burnout parental » (Eyrolles) pour proposer des pistes d'aide « pour intervenir le plus tôt possible et retrouver une vie familiale et personnelle apaisée. »

Les parents en burn-out, plus nombreux que l'on le croit…

En Belgique, 5 à 8% des parents seraient actuellement touchés par le burn-out, d'après une première étude menée sur le sujet en 2018, par des docteures en psychologie, professeures et directrices de recherche à l'université de Louvain, avec le concours de la Mutualité Chrétienne. Valérie Duband explique : 

  • « En quelques décennies, les rôles au sein des familles se sont profondément modifiés. Être un bon père ou une bonne mère est devenu une priorité, l'enfant est dorénavant un élément central dans la vie de ses parents, qui commencent donc à juger les capacités et à estimer leurs performances parentales. L'idéalisation de cette fonction transforme en véritable défi le fait d'être parent ».

Et l'auteure de rappeler que si, auparavant, lles enfants devaient principalement obéir, la tendance est plutôt aujourd'hui à considérer les enfants comment des êtres avec qui ils cherchent à partager de bons moments, tout en les aidant à exprimer leur potentiel, leur talent ou leurs aptitudes.

Et la pression est forte.

La pression de l'entourage, des autres parents, de la société mais surtout d'eux-mêmes.

Au bout du rouleau physiquement et psychologiquement, ils ne se sentent plus compétents dans leur rôle de parents.

Certains, dépassés par leurs enfants qu'ils trouvent épuisants, leur travail et/ou les tâches du quotidien, parviennent même au stade dit de « distanciation affective ».

Sur le site de l'UCLouvain, l'article « Sortir du burnout parental, c'est possible », qui se rapporte à l'étude de l'université précise que : 

  • « Le burnout parental est un syndrome qui touche tous les parents exposés à un stress parental chronique. Il présente plusieurs facettes telles que l'épuisement, la distanciation affective avec les enfants, la perte d'efficacité et d'épanouissement dans son rôle de parent et le contraste — c'est-à-dire une prise de conscience du parent entre celui qu'il était avant (un parent idéal) et ce qu'il est devenu (un parent épuisé, distant et saturé). Le burnout parental peut avoir des conséquences graves sur le parent lui-même (problèmes de santé, addictions, intentions suicidaires...), sur le couple (irritabilité, conflits...) et sur la relation parent-enfant (multiplication par 13 du risque de négliger ses enfants et par 20 de les violenter). Et, généralement, le parent victime du burn-out parental ressent une forte culpabilité. »

Un accompagnement salvateur

Alors que faire ?

Bien sûr, il est possible de se documenter, de lire des témoignages de personnes vont mieux, de suivre des formations en ligne ou de demander conseils à ses proches ou même à d'autres parents sur les réseaux sociaux

Mais quelle que soit la solution, un certain lâcher prise est de mise.

Et quelle que soit la solution, apprendre à gérer la charge mentale et à déléguer est indispensable.

... Même à déléguer des tâches, par exemple ménagères, auprès des enfants... Ce n'est d'ailleurs pas sans atout pédagogique, comme le rapporte notre article 4 bonnes raisons de faire participer vos enfants aux tâches domestiques.

Des applications comme PopMoms, permettent aussi à des parents géographiquement proches de s'entraider, et apportent également des pistes de solutions si l'on envisage de s'accorder du temps, par exemple, en confiant ses enfants à quelqu'un de confiance, le temps de souffler...

Se faire accompagner par la parole est aussi efficace, que ce soit à titre individuel, avec un(e) psychothérapeute ou un(e) coach spécialisé(e), ou dans une dynamique de groupe, avec des ateliers ou groupes de parole dédiés aux parents.

Les Cercles de prise de parole entre parents sont de vraies solutions, témoigne Carmen Kervella qui, pendant le confinement, a lancé avec Stella Haumont les  CERCLES DE PAROLE POUR PARENTS AU BOUT DU ROULEAU.

  • « Beaucoup de mamans nous ont écrit leur difficulté à vivre sereinement le confinement... Les enfants en bas âge à gérer... Le suivi académique pour les plus grands... Les tâches domestiques... la cohabitation avec le conjoint... la solitude des mamans solo... De nombreuses mamans étaient en véritable situation de détresse... Nous avons organisé des rendez-vous en visio hebdomadaires, où par groupes de 10 mamans maximum, nous avons pu libérer la parole, apaiser les tensions, et apporter des conseils concrets par le biais de nos experts ».

Les dynamiques de prise de parole en groupes ont un effet bénéfique mesurable :

  • A titre d'exemple, 150 parents en burn-out ont participé à une étude comparative en Wallonie et en Région bruxelloise pendant huit séances, entre février et juin 2018, une étude organisée par la Mutualité chrétienne en collaboration avec l'UCLouvain (à l'origine de l'étude mentionnée plus haut).

Trois groupes ont été constitués avec différents types d'interventions:

  • Une intervention dite « structurée » (dont l'objectif est de rééquilibrer la balance stress/ressources du parent en allégeant les facteurs de stress et/ou en optimisant ses ressources)
  • Une intervention de type « groupe de parole », plus libre, dans laquelle les parents sont invités à répondre à des questions ouvertes afin d'extérioriser leur souffrance, de mieux la comprendre et la soulager avec l'aide du groupe, tout en suivant des thématiques préétablies (pour qu'ils trouvent leurs propres solutions).
  • Par ailleurs, un autre groupe, de « contrôle », a été mis en place, sans prise en charge.

Résultat :

  • Chez les parents qui ont participé aux groupes d'intervention de type « groupe de parole », les symptômes du burn-out parental ont régressé de 22%,
  • Chez les parents qui ont participé aux groupes d'intervention « structurée », la réduction s'est élevée à 32%.
  • En revanche, en l'absence d'intervention, aucun des symptômes ne s'est réduit, même avec le temps.

Les trois variables testées (le niveau du burn-out parental des participants, les comportements de violence et les comportements de négligence envers les enfants) ont même continué à décroître d'environ 30% trois mois après les séances dans les deux groupes accompagnés.

Cette étude ainsi que de nombreuses expériences menées, montrent les vertus curatives du partage entre pairs.

Parler de sa difficulté à être parent n'est pas un signe de faiblesse, mais de force.

Si vous souhaitez faire partie d'un groupe de parole entre parents, écrivez-nous à lescercles@popmoms.com.

ET VOUS ? Avez-vous connu un burn-out ? Comment cela a-t-il touché votre famille ? Comment vous en êtes-vous sortis ?

 

Un article exclusif signé Yaël Landau pour PopMoms, tous droits réservés©

Yaël Landau est maman de 4 enfants. Journaliste et blogueuse, elle a créé le blog 8h45.com destiné aux parents et le site 6foisplus dédié à l'apprentissage par le jeu.

Crédit photo : un immense merci à Jen Theodore @ Unsplash   

 

 

 

       

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