Les enfants DYS face aux enseignants

Par Yaël Landau, en exclusivité pour PopMoms

Ils n'arrivent toujours pas à lire de façon fluide après le CP (dyslexie), ils parlent de façon non intelligible (dysphasie), ils sont très maladroits (dyxpraxie), écrivent des textes truffés de fautes d'orthographe (dysorthographie) et n'arrivent pas rapidement à effectuer une simple addition (dyscalculie). Les enfants Dys sont pourtant loin d'être bêtes. 

Les troubles dont souffrent ces enfants ne se soignent pas. Les enfants Dys doivent vivre avec.

Troubles spécifiques des apprentissages, ils sont diagnostiqués lorsqu'aucune déficience intellectuelle, ni qu'aucun trouble sensoriel (auditif, visuel, etc.), n'est détecté par ailleurs.

Quid de leur intelligence ?

Les enfants Dys sont intelligents, mais leur cerveau présente des connexions différentes de celles des autres. Leurs troubles peuvent être atténués mais ne peuvent pas disparaître.

Et de consultation d'orthophonistes en aménagements préconisés par des ergothérapeutes, les élèves atteints de troubles Dys s'adaptent et adoptent souvent des stratégies qui leur permettent d'avancer plus ou moins sereinement dans leurs apprentissages scolaires. 

L'un des soucis majeurs, au-delà des troubles diagnostiqués, est le regard des autres - camarades scolaires ou enseignants souvent débordés par leur tâche et impatients - et le corollaire pour l'enfant est souvent le manque de confiance en soi. 

Or, comme explicité dans l'article Confiance en soi, aidez votre enfant à l'acquérir !,  la confiance en soi est une nécessité pour la réussite des apprentissages scolaires, comme pour tout apprentissage d'ailleurs ». Ce constat de plus en plus reconnu est largement souligné par Jeanne Siaud-Facchin, psychologue clinicienne et psychothérapeute dans son ouvrage « Mais qu'est-ce qui l'empêche de réussir » (Odile Jacob).

Faire face au regard des copains et des enseignants

A l'école, par exemple, les camarades de classe et les enseignants peuvent mal interpréter les difficultés que rencontrent certains enfants. 

D'autres enfants se moquent d'eux ou se montrent même jaloux lorsque des dispositifs ou aménagement sont mis en place.

Certains enfants Dys, stigmatisés, peuvent même être harcelés.

Les parents doivent alors être très vigilants ! Pour celles et ceux qui ne savent pas comment réagir, nous vous vous recommandons la lecture de l'article Le harcèlement scolaire, comment le reconnaître, que faire ? publié sur PopMoms .

Certains enseignants mal informés ne cherchent pas à comprendre et vont même jusqu'à considérer ces élèves comme des cancres ou des enfants qui ne travaillent pas ou ne font pas d'effort.

Comme le titrait le magazine en ligne VousNousIls, « Pour aider leurs élèves dys, les enseignants devraient déjà connaître leur handicap », reprenant les mots du docteur Alain Pouhet, ex-médecin de rééducation fonctionnelle au CHU de Poitiers et formateur en neuropsychologie infantile, et spécialiste des TSLA (troubles spécifiques du langage et de l'apprentissage).

  • « Je réalise beaucoup de formations pour les profs... Et force est de constater qu'en formation initiale, les dys sont inexistants », relevait ce médecin dans l'interview où il ajoutait également : « En formation continue, on en parle plus, mais c'est encore trop peu. A part quelques enseignants spécialisés, la plupart ne connaissent pas assez les TSLA. Remarquez que les médecins généralistes non plus ! Les responsabilités en matière de méconnaissance des troubles sont relativement bien partagées...»

Pourtant un enseignant bien informé est bien plus en mesure d'aider ses élèves.

Témoignages d'enseignants

Le docteur Alain Pouhet ajoute aussi :

  • « Par exemple, un enfant dyslexique vif, intelligent et motivé, ne comprendra rien si je lui donne des consignes à l'écrit. Mais quand je les lis, il comprendra tout. Tant qu'il sera dans cette situation de handicap, afin de lui permettre d'accéder aux apprentissages via la lecture et d'aller au maximum de ce dont il est capable, je pourrai donc compenser le problème en favorisant l'oral », explique le docteur Alain Pouhet.
  • « En CE1, on découvre que je suis dysphasique. Dys quoi ? La dysphasie c'est un trouble du développement du langage. En gros, ça veut dire que j'ai des petites difficultés de compréhension et d'expression à l'écrit. Bref, je vous laisse imaginer le nombre d'heures que j'ai dû passer chez l'orthophoniste ! Arrivée en CM1, je me retrouve avec une maîtresse trop cool, patiente et compréhensive. Mais ma maîtresse est un jour remplacée par son opposée : une stagiaire trop jeune, impatiente et sans expérience. Mon cauchemar commence ! », témoigne Ondine sur un site internet.

L'initiative d'une toute petite école !

A Sarreguemines, des professionnels thérapeutes pédiatriques (psychologues, orthophonistes, ergothérapeutes, enseignants, etc.) et des familles se sont associés pour fonder, en septembre 2018, une association et une école spécialisée adaptée aux troubles des apprentissages.

Baptisée ECREAdys (Enseignement, Centre de Recherche, d'Evaluation et d'Accompagnement), l'association est présidée par Thomas Buttaci, neuropsychologue. Elle a pour objectif de proposer un enseignement adapté aux enfants présentant des troubles de l'apprentissage (dysphasie, dyslexie, dyscalculie, dysgraphie...) du CE2 au CM2. Pourquoi pas avant ? Parce que selon Stéphanie Bédé-Völker  « Au CP-CE1, les diagnostics ne sont pas forcément encore posés ».

Cette toute petite école hors contrat (limitée à 12 élèves par classe) a lancé sa campagne de recrutement pour l'année scolaire 2019/2020. Son ambition : offrir un cadre de travail tenant compte des particularités de chacun.

  • « Pour l'élève en situation de troubles des apprentissages, l'objectif est de réintégrer une école dite classique le plus rapidement possible après avoir rattrapé son éventuel retard, amélioré son estime de soi, gagné en autonomie dans le travail, regonflé la confiance en ses compétences et avoir appris toutes les stratégies utiles pour contourner les difficultés liées aux troubles des apprentissages », peut-on lire sur le site internet de l'école.

Le sentiment d'échec a vocation, dans ce cadre, à être évité. Pour autant, tous les enfants ne sont pas pris en charge ainsi.

L'école traditionnelle peut cependant mettre en place des dispositifs de type PPS (Projet Personnalisé de Scolarisation), PAP (Plan d'Accompagnement Personnalisé), PAI (Projet d'Aide Individualisé) ou PPRE (Programme Personnalisé de Réussite Éducative).

Le site Educsol du ministère de l'Education nationale détaille tous ces dispositifs.

A la maison, contourner les problèmes

Les parents peuvent aider leurs enfants à mieux vivre leur différence en leur offrant, notamment, des stratégies de contournement des difficultés.

Les thérapeutes accompagnent les enfants et sont de bons conseils pour trouver des solutions de compensations. 

Des solutions sont également proposées par des entreprises, des particuliers ou des associations, notamment pour pallier les problèmes de lecture que l'on rencontre en cas de dyslexie, ce trouble qui se définit par une mauvaise association entre les signes écrits (graphèmes) et les sons (phonèmes).

A titre d'exemple, une dynamique start-up française a développé et commercialisé une lampe innovante, du nom de Lexilight, qui est une précieuse aide à la lecture pour les dyslexiques. Sa technologie s'appuie en effet sur les travaux de deux chercheurs Breton, Albert Le Floch & Guy Ropars.

A poser sur un bureau ou un chevet, Lexilight permet de détacher les lettres et d'ajuster la netteté. Cette lampe à lumière pulsée et modulée permet au cerveau dyslexique de se libérer de l'effet miroir très perturbant lors de la lecture. Une belle révolution pour les dyslexiques puisque 90% des utilisateurs de Lexilight ont noté une nette amélioration de leur lecture !

Porté par une maman d'enfant dys, un autre projet, Appidys, né en 2016, lauréat du programme Impact d'Ashoka dès 2017, a donné naissance à une  application de lecture accessible aux enfants présentant des handicaps cognitifs, tels que la dyslexie. Grâce à cette application, les livres - devenus ebooks - sont modifiables par l'enfant afin de faciliter la lecture et sont accessibles sur ordinateurs, tablettes et smartphones. Le jeune lecteur choisit sa taille de police, sa taille d'interligne, l'espace entre les mots. Une option permet de surligner un mot (différentes couleurs possibles) et peut déclencher une synthèse vocale (la vitesse de lecture est aussi modifiable). 

En décembre 2018, Isabelle Desprez a confié la suite de la gestion du projet Appidys à l'association Signes de sens qui souhaite étendre le choix de livres et diffuser largement auprès des familles et des professionnels du livre.

De petits éditeurs indépendants comme des éditeurs classiques plus importants sont également lancé des collections ciblant spécifiquement les enfants dyslexiques.

Nathan s'est associé à la start-up nantaise Mobidys pour éditer ses ouvrages labellisés « Dyscool ». Le format FROG, développé par MOBiDYS, permet d'adapter n'importe quel livre existant, en une version accessible aux Dys. L'entreprise conçoit également des versions numériques adaptées à la lecture pour tous.

Au-delà de la lecture, les jeux peuvent aider dans les apprentissages tout en apportant la notion de plaisir qui manque, parfois, lorsque l'on a des difficultés.

Des éditeurs de jeux, orthophonistes ou spécialistes des troubles d'apprentissage se sont d'ailleurs spécialisés sur ce créneau !

Kerozenn et AB Ludis (avec ses jeux Tam Tam) proposent ainsi des jeux pour faciliter l'apprentissage de la lecture ou pour se familiariser avec des notions et concepts mathématiques.

D'autres éditeurs tiennent compte des difficultés des Dys et développent des jeux qui leur sont accessibles.

La jeune société Azawak, avec son « scrabble des mathématiques » baptisé Chifukoo Junior en fait partie. « Chifukoo Junior - La forêt enchantée », est par exemple un jeu qui utilise les quatre opérations mathématiques de base sans pénaliser les jeunes joueurs qui ne les maîtrisent pas encore toutes ni les joueurs ayant des troubles de l'apprentissage en rapport avec les chiffres.

Les initiatives pour aider les apprentissages des enfants dys ne cessent de s'accroitre, et elles émanent parfois d'adultes eux-mêmes dys, c'est le cas de Françoise Chée - dyslexique dysorthographique - bénévole pour diverses associations DMF,  qui a notamment  créé la page Facebook « Astuces pour DYS », et qui est l'auteur du récent ouvrage 50 activités bienveillantes pour les dys (Larousse). Un livre à consulter pour qui cherche des jeux et des astuces à mettre aisément en place, car le jeu représente pour pour tout enfant, dys ou non, un excellent outil d'apprentissage !

Se renseigner et être accompagnés

Les parents ayant un ou plusieurs enfants Dys peuvent également se tourner vers des associations spécialisées pour se renseigner sur les troubles, les dispositifs qui existent ou juste discuter avec d'autres parents.

Locales, régionales ou nationales, il existe beaucoup d'associations dédiées aux dys. La FFDys les référence sur son site.

De nombreux événements sont égalements organisés en ce mois d'octobre, dédié aux dys :

Et pour celles et ceux qui souhaitent en savoir encore plus sur la galaxie des troubles Dys et sur l'impact de ces troubles sur le quotidien des familles concernées, découvrez une autre de nos enquêtes : Les enfants DYS.

Vous pouvez également trouver de l'aide professionnelle sur PopMoms-PRO, notre site qui recense les professionnels de l'enfance et du bien-être de la famille !

Enfin, si vous êtes concerné.e par les troubles Dys, partagez avec nous votre expérience : comment gérez-vous les difficultés que ça engendre ? Vos enfants arrivent-ils à surmonter leurs difficultés scolaires et le regard de leurs camarades ?

 

Crédits :  

Un article exclusif signé Yaël Landau pour PopMoms, l'application des parents qui s'entraident. Tous droits réservés©  Yaël Landau est maman de 4 enfants. Journaliste et blogueuse, elle a créé le blog 8h45.com destiné aux parents et le site 6foisplus dédié à l'apprentissage par le jeu.

Crédit photo : un immense merci à janko-ferlic-unsplash @ Unsplash  

 

       

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